Le 6 janvier 2025, s’ouvre à Paris le procès de Nicolas Sarkozy, ancien président français, accusé d’avoir bénéficié de financements illégaux de la part du défunt dirigeant libyen Mouammar Kadhafi pour sa campagne présidentielle de 2007. Ce procès, qui devrait durer jusqu’en avril, met en lumière la transformation de Kadhafi, autrefois allié stratégique de la France, en principal protagoniste d’une affaire judiciaire sans précédent.
De l’alliance diplomatique à la disgrâce
En décembre 2007, quelques mois après son élection, Nicolas Sarkozy accueillait en grande pompe Mouammar Kadhafi à Paris, marquant le retour du dirigeant libyen sur la scène internationale après des années d’isolement. Cette visite, bien que controversée, symbolisait une nouvelle ère de coopération entre la France et la Libye, avec la signature de nombreux accords économiques et militaires.
Cependant, en 2011, lors du Printemps arabe, Sarkozy fut l’un des premiers dirigeants occidentaux à appeler au départ de Kadhafi et à engager la France dans une intervention militaire en Libye, contribuant à la chute du régime. Cette volte-face a suscité des interrogations sur la nature réelle des relations entre les deux hommes.
Les révélations sur un financement occulte
Les premières allégations d’un financement libyen de la campagne de Sarkozy émergent en 2011, lorsque Saïf al-Islam Kadhafi, fils du dirigeant libyen, affirme que la Libye a contribué à hauteur de 50 millions d’euros à la campagne présidentielle française de 2007. Ces accusations sont renforcées par la publication en 2012 par Mediapart d’un document attribué aux services secrets libyens, évoquant un accord de financement.
Malgré les dénégations répétées de Nicolas Sarkozy, l’enquête judiciaire aboutit à sa mise en examen en 2018 pour corruption passive, financement illégal de campagne électorale et recel de détournement de fonds publics libyens. Les investigations révèlent des témoignages et des documents suggérant des remises de fonds en espèces en provenance de Libye.
Un procès aux enjeux multiples
Le procès qui s’ouvre aujourd’hui est historique : c’est la première fois qu’un ancien président français est jugé pour des faits de corruption impliquant un État étranger. Nicolas Sarkozy, qui encourt jusqu’à dix ans de prison et une amende de 375 000 euros s’il est reconnu coupable, continue de clamer son innocence, dénonçant un « complot politique » et une « instrumentalisation de la justice ». Ses avocats comptent démonter les accusations en pointant l’absence de preuves matérielles directes et les contradictions dans les témoignages recueillis.
Ce procès, au-delà de son aspect judiciaire, met en lumière les relations troubles entre la France et la Libye sous Kadhafi. Il soulève aussi des questions sur les pratiques de financement des campagnes électorales et l’influence d’acteurs étrangers sur la politique française. Alors que les audiences s’annoncent riches en révélations, l’ombre de Kadhafi plane toujours sur cette affaire, illustrant l’héritage complexe laissé par l’ancien dictateur sur la scène internationale.