Dans la nuit du 23 au 24 avril, une offensive aérienne russe a frappé plusieurs quartiers de Kiev, faisant au moins neuf morts et plus de soixante-dix blessés. Alors que la capitale ukrainienne recensait ses victimes, les négociations de paix à Londres ont été suspendues après la présentation d’un plan soutenu par Donald Trump, perçu par les autorités ukrainiennes comme une reddition diplomatique. La perspective d’une paix négociée semble plus incertaine que jamais.
Frappes sur Kiev : une démonstration de force stratégique
À 2 h 43, ce jeudi 24 avril, les sirènes d’alerte ont retenti dans Kiev. Peu après, dix missiles Iskander et vingt-quatre drones Shahed se sont abattus sur plusieurs quartiers résidentiels. Le bilan, communiqué à 9 h par l’administration militaire, fait état de neuf morts et soixante-treize blessés. Des infrastructures civiles, dont une école, un hôpital pédiatrique et des immeubles d’habitation, ont été gravement endommagées à Shevchenkivskyi, Solomianskyï et Holosiivskyi.
Des images diffusées par l’agence Reuters dans la matinée montrent des enfants évacués dans des conditions précaires, et des immeubles d’habitation littéralement éventrés, certains réduits à l’état de carcasses de béton fumantes. Selon le ministère ukrainien de la Défense, 21 drones ont été interceptés, mais plusieurs ogives ont franchi les défenses, malgré les équipements occidentaux.
Pour Michael Clarke, professeur au King’s College de Londres, ces frappes s’inscrivent dans « une logique de pression diplomatique continue ». Il rappelle que des attaques similaires ont été menées en amont des sommets de novembre 2023 et février 2024, soulignant la stratégie russe d’affaiblissement par la terreur.
À Londres, une paix conditionnée et contestée
En parallèle, à Londres, les discussions diplomatiques ont déraillé après la soumission d’un plan par Donald Trump, transmis par son ancien ambassadeur Richard Grenell. Le texte propose une reconnaissance de l’annexion de la Crimée, un gel du front actuel, et l’arrêt de l’aide militaire américaine. En contrepartie : un cessez-le-feu immédiat et un programme de reconstruction.
Kiev a vivement réagi. « Ce plan revient à légitimer l’agression russe. C’est une reddition politique, pas une paix », a déclaré Dmytro Kuleba. Zelensky a déclaré lors d’une allocution télévisée que « l’Ukraine ne deviendra jamais un pion dans une paix imposée ». Il a aussi dénoncé une tentative de « diviser les alliés de l’Ukraine et d’offrir à Moscou ce qu’elle n’a pas pu obtenir militairement ».
Matthew Miller, porte-parole du Département d’État, a tenté d’atténuer la position américaine, rappelant que « toute décision sur la souveraineté territoriale de l’Ukraine appartient à son peuple ». Simultanément, J.D. Vance, vice-président, a indiqué que « l’aide militaire américaine pourrait être réévaluée » si Kiev persistait à refuser le plan, selon Reuters.
En Europe, les lignes bougent. Tandis que l’Allemagne évoque « un cessez-le-feu partiel à étudier » et que la Hongrie salue une approche « pragmatique », le Quai d’Orsay réaffirme le soutien français à « une paix conforme au droit international ».
La proposition Trump rompt avec les précédentes tentatives comme les accords de Minsk. Ces derniers prévoyaient une désescalade progressive et des élections supervisées dans les territoires occupés. Le plan actuel, lui, entérine les gains russes sans contrepartie pour l’Ukraine. Le secrétaire général de l’ONU, António Guterres, a exprimé sa « vive préoccupation » et appelé à « une solution respectueuse de la souveraineté ukrainienne ».
Tandis qu’à Kiev, les habitants nettoient les débris encore fumants des frappes nocturnes, les diplomates, à Londres, observent un silence embarrassé. Les négociations menées sous l’égide du Royaume-Uni avec la participation d’émissaires américains, européens et ukrainiens sont suspendues, sans issue concrète. À Moscou, Vladimir Poutine évoque « une prise de conscience salutaire de certains partenaires occidentaux ».
Alors que les positions se durcissent et que la perspective d’une paix durable paraît lointaine, les récentes tentatives de négociation marquent néanmoins des avancées fragiles vers une issue au conflit. Une question centrale demeure : qui aura la légitimité de définir les contours d’une paix durable ? Et selon quels principes sera-t-elle négociée ?